Le message de Kevin Cappelli aux jurés du Prix lycéen de la philosophie:
Certains élèves auront déjà rencontré le célèbre propos de Heidegger : la technique moderne renferme, dans son essence, un danger. Aujourd’hui pourtant, elle nous séduit et nous captive au plus haut point : nous lui demandons toujours plus de vitesse, de connexion, de satisfaction, d’informations, de décisions – d’« intelligence ».
Mon texte tente d’expliquer ce péril : en raison de son agencement intégral par les technologies de déplacement et de communication, notre réalité soi-disant « mondialisée » tend à restreindre le déploiement d’un monde dans lequel nous pourrions mener ensemble notre vie.
Heidegger, Arendt, Anders, Debord… Cela fera au moins un siècle que ce péril est philosophiquement pris en charge, de manière chaque fois renouvelée. Dans cette époque de machinisme mobilitaire et médiatique, il est peut-être de plus en plus difficile – mais dès lors d’autant plus urgent – de porter notre attention sur de telles pensées. Par ce texte, j’espère simplement contribuer à transmettre l’héritage de ces philosophies, si importantes à mes yeux pour interroger nos illusions et reconsidérer ce que nous aimerions faire de notre vie en commun.
Je remercie d’avance mes lecteurs lycéens, et leur demande d’entendre que si nous souhaitons « empêcher que le monde se défasse », comme disait Camus, il nous revient de refuser notre fascination au dispositif technologique qui planifie et exploite nos existences. Nous pourrons alors nous rendre disponibles aux occasions de tous ordres de laisser le monde, déjà ancien mais aussi toujours neuf, advenir encore et encore.
Qui est Kévin Cappelli ?
Né en 1985, Kévin Cappelli est professeur agrégé de philosophie en lycée. Il est membre de la Société bretonne de philosophie, association rennaise qui propose des ateliers populaires de réflexion et de discussion. Ce cadre lui a permis d’écrire et de publier son premier ouvrage, L’Expérience du monde.