
Nous nous contentons trop souvent de mépriser les idées politiques auxquelles nous n’adhérons pas. Dans une société polarisée, les représentants de « l’autre bord » sont tenus pour irrationnels, dogmatiques et pétris de préjugés. On ne dialogue pas avec eux, on les combat. Cet ouvrage propose de remettre l’argumentation au centre des débats d’idées. Si le désaccord persiste, il y a fort à parier que chaque camp dispose de quelques raisons en sa faveur. Aussi doit-on commencer par prendre nos adversaires au sérieux et évaluer avec honnêteté la solidité de leurs justifications. L’essai entend pour ce faire clarifier la structure logique des arguments, mettre en lumière les vices et vertus dialectiques et dégager les conditions de légitimité des décisions démocratiques. En articulant ces trois approches, on peut espérer contribuer à endiguer la culture du clash qui mine aujourd’hui le débat public.
Qui est Antoine Vuille ?

Antoine Vuille est docteur en philosophie de l’Université de Neuchâtel où il a été assistant puis chargé de cours. Il enseigne désormais la philosophie et le français au gymnase. Il est également l’auteur d’un recueil de nouvelles, Les Choses à faire (L’Âge d’Homme, 2019).
Le mot d’Antoine Vuille aux lycéens jurés
Chères lycéennes, chers lycéens,
Les questions politiques sont complexes par nature et, si le débat fait rage, c’est sans doute parce qu’il y a des arguments pertinents dans les deux camps. Pourtant, de nombreux sujets de société tournent à l’affrontement stérile entre deux bords incapables de dialoguer. On ne se parle plus ; on se caricature, on se méprise, on s’insulte.
Mais cette dérive n’est pas une fatalité. La philosophie peut nous aider à renouer avec des échanges rationnels, dépersonnalisés et féconds. Elle nous rappelle ainsi que le but d’un débat n’est pas d’écraser l’autre, mais d’établir ensemble la vérité. Cette démarche suppose de remettre les arguments au cœur des discussions, de reconnaître nos opposants comme des interlocuteurs légitimes, d’éviter de prendre les objections comme des attaques personnelles et de garder en tête l’hypothèse que, peut-être, ce sont les autres qui ont raison – et nous, tort. En bref, pour endiguer la culture du clash qui menace nos démocraties, il est essentiel de prendre au sérieux les idées auxquelles nous n’adhérons pas.